Je reviens de son site, comme en pélérinage. Une vingtaine de photos racontent des tranches de vies. Il les commente. Emouvant d'entendre une nouvelle fois sa voix, à la fois douce pour négocier et forte pour crier. Il dit : "j'ai passé ma vie à essayer de réaliser ce dont j'avais rêvé étant enfant. Comme j'étais un enfant très rêveur, j'ai eu besoin de beaucoup de vies. Pas pour tout réaliser, mais au moins pour essayer."
Liban, Afghanistan, Bosnie, Europe… Il fut de tous les grands combats de la seconde moitié du XXè siècle. Les directeurs de journaux décident de ne plus couvrir l'Afghanistan, trop dangereux. Il fonce… "La seule réponse à l'interdiction d'aller, c'est d'aller. La seule réponse à l'interdiction de parler, c'est de parler." Ce fut sa rencontre avec le Commandant Massoud dont il porta la parole.
Diplomate, il rédigea plusieurs articles du traité de Rome et fit inscrire le mot "idéal" dans son préambule… Idéal, un mot que seuls les aventuriers et quelques politiques, trop rares, osent encore clamer. Mais nous en reparlerons à la fin de mon papier…
Il disait encore : "Il n’y a que les Français pour se raconter entre eux que nous sommes toujours le pays des droits de l’homme. A l’étranger, on parle de notre bonne cuisine, de notre accueil assez désagréable, des grèves de notre service public et des records du chômage. Certes, notre pays a toujours le prestige de sa littérature et de son passé, mais il n’est plus un modèle pour les autres. Il ne l’est déjà pas pour ses propres habitants. Nous nous trouvons dans un trou de l’histoire mais cela n’a rien de dramatique, tous les peuples ont connu ce genre de passage à vide. Il ne faut pas désespérer : des réveils, des sursauts sont toujours possibles."
L'aventure et l’engagement auront marqué sa vie. "Il n’est pas de bonne pensée si elle ne se traduit pas en parole, pas de bonne parole si elle ne se traduit pas en acte."
En parlant de paroles et d'actes, justement. Cette campagne des présidentielles tombe de plus en plus bas. Il faut dire que le débat surfe sur la communication, le paraître, la forme, plus que le fond, faute (pour l'instant) de programme du côté de Ségolène Royal. Alors on commente les fautes de l'un. On en invente à l'autre. On se gausse de l'une, on voit dans l'autre un inspecteur gadget de cartoon. L'une fait rédiger un livre sur l'autre tout en se gargarisant d'une campagne propre… De grâce, on n'est pas dans un sitcom du câble, aux rires préprogrammés. Il s'agit de notre pays et de sa place dans le monde.
Tiens, qui nous parle de ces 42 000 euros ? Vous savez, ceux que chacun d'entre nous doit, nouveau né compris. 42 000 euros : la dette de la France par français. J'entends juste, timidement, François Bayrou le dire. Et dénoncer les promesses à tout va. Je rêve que l'un des candidats décide de nous conduire dans une belle aventure. Celle où l'on considèrerait chaque Français comme quelqu'un d'intelligent. Comme Jean Chrétien, premier ministre du Canada, avait su le faire en 1993. Il était venu au journal du soir annoncer que son pays était en faillite et qu'il fallait chausser ses bottes de chantier, retrousser ses manches, et tout mettre en œuvre pour s'en sortir.
A son arrivée, en 1993, la dette du Canada dépassait les 72% de son Produit Intérieur Brut et son déficit budgétaire, les 6%. En trois ans, il a opéré un redressement complet de la situation. Ce fut dur. Il pensait ne jamais être réélu. Il le fut à trois reprises ! Aujourd’hui, on ne connaît plus le mot déficit au Canada où les débats portent désormais sur l’affectation des excédents du budget fédéral réclamés par les provinces !
Allez, Sarko, chiche ? Vous seriez alors digne d'un Jean-François Deniau… "Des réveils, des sursauts sont toujours possibles."
Je suis heureux pour elle car c'est une fille bien, même si beaucoup de combats politiques nous séparent. C'est aussi un symbole. Celle de cette nouvelle génération qui va, très vite, donner un coup de vieux aux politiques qui nous entourent…
Autre aventure, celle de l'Afrique. Je rentre des vœux de Charles Millon. Depuis qu'il représente la France au sein de la FAO, à Rome, son regard a changé, plus grave. Il dénonce ces candidats, présents à chaque élection, qui, plutôt que "de penser à court terme, feraient mieux de voir loin. De préférer une politique d'ambition à une politique de réaction, de coups médiatiques…"
Son regard a changé. On le sent de plus en plus habité par sa mission. Jours après jours, il est aux côtés des plus pauvres, en Afrique comme en Asie. Il tente, avec de bien faibles moyens, de leur venir en aide. Tout en allant à l'encontre des idées reçues. L'aide à la personne est son crédo. "Car l'Etat providence conduit à l'irresponsabilité, à l'assistanat, à se croire détenteur de "droits à" au lieu d'être détenteur de "droits de", qui conduisent à l'action."
Des vœux qui avaient lieu dans le cadre du Musée des Missions Africaines. L'occasion de parler de la Francophonie. Un sujet qui m'est cher. Nous avons créé, à la mairie du 6è, le Mois de la Francophonie, parrainé pour sa première édition, par le président du Sénégal, Abdoulaye Wade, et pour sa seconde édition par le président de la Francophonie, Abdou Diouf. L'an 3 est en cours de préparation… Il aura lieu, comme chaque année, en mars. "Si l'on regarde une carte, la France et l'Europe sont toutes petites par rapport aux Amériques, à l'Asie, à l'Inde… Or la France se doit d'être le lien qui unira l'Europe à l'Afrique." Une belle aventure, un bel idéal, dans lequel Lyon a un rôle capital à jouer. Première ville de l'Afrique noire francophone, historiquement proche de ce continent si attachant, Lyon doit devenir une capitale de la Francophonie. Il en va de notre avenir.
"Il n’est pas de bonne pensée si elle ne se traduit pas en parole, pas de bonne parole si elle ne se traduit pas en acte." Nous aurons donc l'occasion d'en reparler très prochainement…
L'aventure est belle, et elle n'est pas prête de s'arrêter. Tant que l'on a un idéal à défendre, le combat vaut le coup d'être porté…
Corto Maltese… le mythique héros de BD, créé par le non moins légendaire Hugo Pratt, va bientôt renaître de ses cendres. Promesse de nouvelles bulles poétiques et oniriques dont nos hommes (et femmes) politiques, trop souvent barricadés dans leurs vieilles habitudes et leur petite réthorique, feraient bien de s'inspirer. Sans doute y trouveraient-ils ce goût de l'action, cette envie de faire bouger les choses, quitte à, parfois, dépasser les lignes idéologiques, dont ils manquent tant. L'Aventure ! Celle de l'action donc, mais aussi et surtout (l'une n'allant pas sans l'autre) celle de l'esprit. Se méfier des a priori, des solutions faciles et des appels sans lendemain, c'est sans doute cela, imaginer et, de fait, se donner les moyens de construire la France et l'Europe de demain.
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Oui l'Abbé Pierre est un grand bonhomme, oui il mérite l'hommage unanime qui lui est rendu.
Jean-François Deniau s'en est allé dans la discrétion noyé dans le bruit médiatique fait autour de l'Abbé.
La faute à l'Abbé ? Non ! Peut-être Jean-François a-t-il choisi ce moment pour s'éclipser sur la pointe des pieds sans faire de bruit.
Jean-François aura marqué par sa manière d'être au milieu de partout, curieux de tout et attentif à tout y compris aux oubliés de l'actualité comme Massoud.
Adieu Jean-françois et bon vent.
Phil
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Trés bon ton article sur Deniau. C'etait un grand Monsieur qui merite notre respect.
Pour Charles, je suis étonné : il ne propose rien ,et je me demande si il a encore l'intention et l'envie de participer a cette campagne electorale.
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Merci Erick pour ton analyse…
Ce que je retiendrai de cette » belle aventure » c'est en effet ce regard de Charles Millon sur le monde et cette France que nous aimons. Son regard d'acier est toujours aussi lucide et son discours sur l'Afrique ,qui souffre et que nous abandonnons progressivement par manque de moyens et surtout de volonté politique, résonne d'autant plus fort quil fait écho à celui de l'Abbé Pierre ;les circonstances et le climat sont différents mais les êtres souffrent de la même façon.
Quel est celui qui osera en parler dans la cacophonie des mauvais jeux de mots et des aggressions personnelles qui deviennent détestables ?
La France mérite mieux que tout cela et les candidats au poste suprême quels qu'ils soient , seraient bien inspirés de recentrer le débat sur la France et la vision qu'ils en ont; C'est aussi cela la noblesse du dicours!
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Très beau balayage des derniers évènements qui en valent la peine : en premier rappel du parcours de Jean François Deniau, cet homme qui a su exister pour lui et pour les autres, ensuite parallèle avec une campagne présidentielle qui se délite un peu ces jours-ci, reconnaissance d'une femme politique lyonnaise en la personne de Najat Belkacem qui prouve que l'éthique en politique quelque soit son bord est toujours payante et pour finir l'hommage à Charles Millon qui nous renvoie à l'homme cité en premier. C'est du grand art !
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Vous indiquez que Charles Millon ne propose rien. Vous me faites penser à une personne venue écouter un orateur dont il ne connait pas la langue : fidèle à ses idées, Charles Millon ne propose pas un plat tout cuisiné, mais les ingrédients pour cuisiner le plat. Il définit les grandes lignes et appelle chacun d'entre nous à y travailler. C'est cela être un grand « Chef ». Pour comprendre quelqu'un il faut déjà apprendre son langage, approuver ses idées. Pour le reste, il me semble qu'il est très présent parmis nous tel un « Père » attentif aux premiers pas de ses enfants.
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Votre chronique est très sympathique ,quoique un peu dilettante dans le contexte des enjeux électoraux en cours, qui dépassent ceux de Lyon intra muros.Il serait temps que vous apportiez plus clairement votre soutien à l'élection de Nicolas Sarkozy et entrainiez vos amis « millonistes » dans ce mouvement avant que les sondages n'accélèrent les ralliements !.La prudence est une grande vertu lyonnaise ,tant qu'elle s'autorise à se risquer à etre courageuse de remps en temps .
bien cordialement.
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Bonjour Xavier !
Votre éloignement de Lyon fait que vous avez sûrement loupé quelques articles de presse (Progrès, Lyon Mag…) dans lesquels j'ai publiquement affirmé mon soutien à Nicolas Sarkozy. J'ai même participé, avec quelques amis élus, à la création de l'antenne locale des Amis de Nicolas Sarkozy.
Mais soutien ne veut pas dire aveuglement ou béni-oui-oui. Principe de réalité et convictions politiques obligent !
Quant à mon « dilétantisme », je crois que l'on en a tous un peu marre de ces élus qui se croient les sauveurs du monde sur leurs blogs. Je préfère exprimer mes idées avec le sourire plutôt qu'en étant ch… ! Mais vous me connaissez depuis assez longtemps pour le savoir…
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Merci Erick pour la pertinence de vos analyses. Ce que je retiens en tant que sénégalais, c'est la place que les poliques français accordent à la francophonie dans le débat actuel. En nommant Rama Yade Secrétaire Nationale UMP à la Francophonie, je crois que Sarkozy adresse un signal fort à l'Afrique et à ses immigrés installés en France. Tout le contraire de la gauche qui je crois souffre d'un réel traumatisme sur ce sujet. Le discours de Sarkozy tenu au Bénin sur la responsabilité des élites africaines est on ne peut plus salutaire. Et face à l'offensive inquiétante des chinois sur le continent africain, la France doit mettre en place une diplomatie plus offensive. Et pour cela, la droite présente beaucoup plus d'atouts.
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Merci de ton mot, cher Malick.
Pour les lecteurs du blog, Malick a fondé à Lyon il y a quelques années l'Association des Jeunes Volontaires Francophones qui rayonne désormais dans 22 pays francophones.
Reconnue (et subventionnée) par l'Etat, elle n'a jamais réussi à se faire entendre (et aider) par la ville de Lyon. Et pourtant, son siège social est chez nous… Et pourtant, Lyon a une histoire, et j'en suis persuadé, un destin francophone à assurer. Mais nous aurons l'occasion d'en reparler dans les prochaines semaines…
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