Escarpins de chantier

« En 15 jours, je suis devenue une vraie lyonnaise. Ce soir, dîner dans un bouchon avec mon époux et demain, TGV du matin pour Paris, direction le conseil des ministres avant de rentrer à Lyon, place Bellecour, dans l’après-midi. » Tout sourire, Christine Boutin fronce des yeux qui pétillent de malice. Rencontres à l’ombre des algecos.

Il était de bon ton, aux XVIIIè et XIXè siècles de tenir salon dans les beaux immeubles de la place Bellecour. Les temps changent, et c’est dans une enfilade de 22 algeco que Madame le ministre du Logement et de la Ville tient depuis 15 jours salon. Ce soir, elle avait invité les membres du Cercle de l’Union et du Prisme à prendre l’apéro, juste après une réunion de travail avec les associations familiales de France (UDAF). En toute simplicité.
Et de rappeler qu’elle est d’abord le ministre de l’homme et de sa dignité. « Je suis aussi en charge de la précarité et de l’exclusion. C’est-à-dire d’hommes, de femmes et d’enfants dans une véritable détresse. » Une fonction bien loin du « ministère de la parole » cher à d’autres. Un ministère qui revendique un résultat final : « que l’on ne parle pas de nous, ce qui voudra dire que nous avons résolu bien des problèmes ! » On sent qu’elle aime les personnes, Christine. Et pas simplement les « VIP » qu’elle invite à l’apéro. Derrière l’image caricaturale qui lui colle à la peau (et que j’avais en tête avant de la rencontrer), il y a une femme à la fibre catholique et sociale, tout à fait dans la tradition lyonnaise. Une femme bien, parfois exessive, mais attachante.
C’est le 17 septembre que 30 collaborateurs du ministère ont pris leurs quartiers d’automne entre Rhône et Saône. « Une idée un peu folle lancée un jour par Christine, lâche Marie-José Le Nagard, chef du secrétariat particulier, sa collaboratrice depuis 15 ans. Nous avons immédiatement dit banco ! Et c’est, je peux vous l’affirmer, un bonheur de vivre à Lyon, même s’il y a parfois eu des difficultés d’organisation. » Tout le monde loge dans un VVF du 1er arrondissement et, au sortir du bureau (pardon de la cabane de chantier), c’est cochonnailles pour toute l’équipe. Avec une préférence pour « L’atelier d’Yvonne », rue des Marronniers ou pour la traditionnelle rue Mercière.
En attendant, ce soir vers 21 heures, les algecos étaient pleins à craquer. Là aussi, ça sent la pénurue de mètres carrés ! Beaucoup de jeunes, ordinateurs portables du ministère ou perso (des macintosh !) en actions. Des réunions à préparer, des rendez-vous, des coups médiatiques, des visites de terrain. L’agenda est chargé. Il doit déborder. Ordre de Christine !
La soirée se prépare, on en discute d’algeco en algeco, fenêtres ouvertes. Une bouteille de champagne disparaît sous un bureau, chipée sur le buffet qui se dresse.
Personnage incontournable de l’équipe : Pascal Luton, l’intendant du ministère. Dès 8 heures du matin, il écume les marchés du quai Saint Antoine et de la Croix-Rousse à la recherche de produits du terroir. Pas facile de gérer les repas et les apéros du soir sans cuisine digne de ce nom… « Je suis très impressionné de la qualité et la fraîcheur des produits. Les maraîchers m’ont réservé un excellent accueil, n’hésitant pas à me faire goûter leurs fruits et légumes. J’ai trouvé des confitures superbes et découvert une salade, la reine des glaces, que je sers depuis régulièrement, les déjeuners étant froids, faute de réchaud. » Spartiate, le campement !
Il faut dire que le budget est, somme toute, assez minime. « 250 000 euros, hébergement compris », annonce Olivier Esquirol, conseiller spécial, qui ne regrette pas cette immersion dans Lyon. « Les lyonnais sont très chaleureux. On a le sentiment d’une ville ouverte, heureuse de vivre, gaie. Et puis, au quotidien, nous sommes confrontés à de nombreuses personnes en état de détresse absolue que les associations n’arrivent plus à prendre en charge. Et c‘est bien là le paradoxe de Lyon. Une certaine forme d’insouciance et une misère souvent masquée. »
Vendredi, Christine Boutin signera, avec 30 partenaires économiques, la charte qui ouvrira le chantier national du logement. « Nous construirons ensemble 500 000 logements par an pour combler les retards pris depuis des dizaines d’années. Il n’est pas acceptable, ainsi que l’a rappelé Nicolas Sarkozy, que dans la 5è puissance mondiale, des hommes et des femmes ne puissent pas se loger sur notre territoire. » Une élue d’attaque, qui épuise ses collaborateurs, et qui entend bien être le ministre de tous les logements, sociaux, mais aussi du domaine privé. Une précision notée avec gourmandise par l’un des administrateurs de biens les plus en vue de Lyon. Ce membre influent du Cercle de l’Union, frayant pour la bonne cause avec une adhérente réputée du Prisme, spécialiste reconnue des relations publiques, a immédiatement rebondi sur ce thème pour « vendre » un coup de com au ministre. Mais nous aurons sûrement l’occasion d’en reparler… Faisons leur confiance !
Mi-octobre, le chantier (dans une version light) se déplacera à Lille. Avant d’investir d’autres villes. Infatigable Christine.

Les Commentaires ( 8 )

  1. de Marc
    posté le 26 sept 2007

    Merci de nous faire découvrir ce qu'il y a de l'autre côté des palissades de chantier. L'envers du décors.
    Lyonnaise en seulement 15 jours… Mazettz ! Perben doit en être jaloux. D'autant qu'elle smble bien sympa, elle !

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  2. de Aude Challe
    posté le 26 sept 2007

    C'est bizarre, mais même après la lecture de votre blog, je n'arrive pas à oublier les larmes et la bible en bandouillère. Et les attques anti PACS. Madame la Ministre a depuis fait amende honorable, mais bon, contrition réelle ou coup de pub ?
    Laissons lui le bénéfice du doute. Et espérons que ses yeux pétillent toujours de malice à la fin de son bail de ministre. Et que le bilan soit au rendez-vous…

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  3. de Pauline
    posté le 26 sept 2007

    J'aime beaucoup le logo « ouvert au public », car vu de l'extérieur, le chantier semble assez difficile d'accès. Sauf pour les assos et les « VIP ».
    Bon, à côté de ça, un ministère n'est pas un comptoir des réclamations, mais si CB « aime les personnes », elle devrait consacrer plus de temps aux visites off, sans télés et journalistes. Immersions dans la vraie vie, celle des plus démunis. Bien loin des palissades pour rire.

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  4. de Seb
    posté le 26 sept 2007

    Moi je la trouve plutôt sympa cette ministre. Au moins, dans ses propos en petit comité, elle a pas l'air de se prendre trop au sérieux, même si son rôle l'est par nature.

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  5. de Aude Challe
    posté le 26 sept 2007

    C’est un couple imprévu, mais prometteur. Après avoir proposé à Augustin Legrand, porte-parole des Don Quichotte, d’accepter une mission, Christine Boutin l’a retrouvé hier sur la place Bellecour de Lyon, où elle a décentralisé pour dix jours son ministère du Logement. Un rendez-vous est prévu aujourd’hui entre le militant et le directeur de cabinet de Boutin, pour préciser les contours possibles de la mission. Le militant hésite. Mais sa visite laisse entrevoir le piment d’un tel rapprochement, s’il se confirmait.
    Sur le même sujet

    * Si j’y vais, je serai une épine dans leur piedŸ

    Accueil. Boutin et Legrand coprésidaient une réunion du comité de suivi du plan d’action renforcé en faveur des sans-abri (Parsa). Le militant y a dénoncé les promesses non tenues (voir ci-contre). Puis il a pointé les lourdeurs de l’administrationŸ. Christine Boutin lui a répondu : Si tu acceptes la mission, tu verras que c’est plus complexe. Il n’y a pas que des lourdeurs administratives.Ÿ La ministre avait visité le matin un centre d’accueil de Notre Dame des sans-abri, qui tient une place importante dans l’accueil et l’accompagnement. Son président, lui, a indiqué qu’il avait la possibilité, grâce au mécénat lyonnais, de mobiliser en cash plusieurs millions d’euros en quarante-huit heuresŸ, mais que l’association ne trouve pas de lieux à acheter. La ministre s’est emportée. Les obstacles dans les têtes, ça ne relève pas de Bercy. C’est scandaleux. J’ai la rage, comme dirait Fadela.Ÿ Selon Augustin Legrand, elle est sincère, elle ne fait pas semblant. On ne peut pas douter de sa déterminationŸ.

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  6. de Pascale
    posté le 26 sept 2007

    J'ai rencontré Christine BOUTIN à la mairie du 3° la semaine dernière, et j'ai été ravie de cette rencontre;Je m'attendais a trouver une femme plutôt catho-coincée type Versailles -Saint Louis!
    Rien de tout cela , ouvete , joyeuse , dynamique , inventive et surtot libre de paroles ! ce n'était pas madame le Ministre , mais bien Christine Boutin que l'on rencontrait.
    D'ailleurs tous ceux qui étaient présents ont eu cette excellente impression
    Le soir même je cliquais sur le site des Républicains Sociaux, où l'on découvre une » droite humaine «  »et généreuse;

    Les mois qui viennent seront majeurs quand les cabanes de Belllecour seront parties sur de vrais chantiers!
    A suivre….

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  7. de Jerome REVY
    posté le 26 sept 2007

    Merci Erick pour les commentaires de cette soirée que j'ai également suivie avec toi, et qui s'est prolongée dans un petit resto du vieux Lyon avec Christine et Louis, son mari.
    Je bosse à ses côtés depuis les présidentielles de 2002 et je trouve que c'est une femme extrèmement courageuse. Elle incarne une droite décomplexée qui s'entend très bien avec celle de Sarko, et qui défend sans tabous la personne humaine dans toutes ses dimensions.

    Pour tous ceux qui défendent cette droite humaine, je vous invite aussi à cliquer sur le site des républicains sociaux (www.frs-ladroitehumaine.fr).

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  8. de judith
    posté le 26 sept 2007

    je n'arrive pas à oublier les larmes et la bible en bandouillère. Et les attaques anti PACS.n'ayons pas la mémoire courte .
    cela me rappelle les croisades l'épée d'une main et de l'autre le goupillon .

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