Il y a d’abord la couverture, essentielle. Un regard, un dessin, à mi-chemin entre l’aéro et Photoshop. Superbe ! Un format ensuite. Grand, qui détonne dans le rayon. Et puis un poids. 200 pages (196 exactement).
Je feuillette. Livre, revue ? Je ne sais toujours pas. Un peu des deux, sûrement.
L’édito, signé des deux principaux actionnaires, Laurent Beccaria, un éditeur, et Patrick de Saint-Exupéry, journaliste au Figaro, Prix Albert Londres (le Nobel des Journalistes avec le Pulitzer), fixe l’enjeu.
« Messieurs, vous apprendrez qu’un reporter ne connaît qu’une ligne, celle du chemin de fer », répliqua Albert Londres en claquant la porte du Quotidien, le journal qui l’employait et dont les dirigeants lui reprochaient de ne pas être « dans la ligne ». (…) Albert Londres préférait la vérité des choses vues et des êtres rencontrés. Il allait là où les autres passaient leur chemin et aimait ceux dont il racontait le destin, qu’ils soient forçats de la route ou bagnards de Cayenne, fous à l’asile ou pêcheurs de perles. Et il était lu. Les courbes de ventes épousaient le rythme de ses reportages. Il arrivait que les lecteurs fassent la queue à la sortie des roratives, en pleine nuit !
Ce journalisme est éternel, seules ses formes changent. Il est toujours aussi nécessaire. L’information s’est multipliée, et notre regard s’est rétréci. Prendre le temps, se décaler, redonner des couleurs au monde, de l’épaisseur aux choses, de la présence aux gens, aller voir, rendre compte : telle est la volonté de XXI. »
Revue et roman !
Je viens de terminer le premier numéro de XXI et déjà je piaffe d’impatience. Encore deux mois à attendre… Pour la première fois depuis longtemps, j’ai envie de m’abonner à une revue. Et je ne suis pas le seul. Les 40 000 premiers exemplaires distribués (exclusivement par les libraires) sont partis en moins d’un mois. Un retirage est en cours. Rare dans le monde de la presse qui prend le temps de décrypter. Preuve qu’il y a un besoin. Celui de se poser, de partir en découverte, de comprendre, de retrouver le souffle des événements, de trouver un contrepoint à l’internet et aux chaînes d’information en continu où tout n’est qu’éphémère.
30 pages mettent en relief les événements du trimestre, au travers de rubriques comme « mots pour mots » qui analyse le discours controversé de Sarko à Dakar, « Il a dit » qui décrypte le verbatim du très dangereux président iranien. Puis vient le dossier. 60 pages ! J’ai bien écrit 60 pages, consacrées à la Russie sous le titre « Le dollar et le marteau ». Six papiers fouillés, de Ploërmel aux bagnes de Sibérie (étonnant photo reportage de 26 pages) en passant par l’envers du système Poutine ou le national capitalisme. Puis 80 pages de reportages enchaînent. Mexique, avec les « bardes » à la gloire des narco-trafiquants, la France de la désobéissance, un entretien avec le respecté Bronislaw Geremek, dont la vie se fond avec l’Histoire de la Pologne et de l’Europe… Présents à toute les pages des illustrations, chassant souvent la photographie, et donnant place à l’imaginaire. Genre nouveau, la BD reportage vient conclure, en 30 pages, ce magazine d’exception.
Courrez l’acheter avant qu’il n’y en ai plus ! Et surfez sur leur blog où des papiers inédits seront régulièrement mis en ligne.
Autre blogueur acharné, Yves Jégo revient sur cette opération spectacle. Sur itélé, il se demande par qui sont mises en cause les valeurs de la République et de la laïcité. « L’appel ne le dit pas, l’appel ne cite personne. Alors, il y a deux solutions: soit ils ont raison, et qu’ils nous disent qui met en cause les valeurs de la République » et la « laïcité », soit « c’est une manipulation, c’est le bal des revanchards, c’est la coalition des aigris, qui veut utiliser une période politique particulière pour essayer de reprendre ce que le suffrage universel ne leur a pas donné. »
Un débat chers lecteurs ?
Quand Nicolas Sarkozy a souhaité que « tous les enfants de CM2 se voient confier la mémoire d’un des 11 000 enfants français victimes de la Shoah », mercredi au dîner du Crif, l’effet de surprise a été total et les toutes premières réactions plutôt positives. Pour ma part, et j’ai eu l’occasion d’en discuter avec un journaliste du Progrès vendredi dernier en marge de la visite à Lyon de Xavier Bertrand, je n’ai pas compris ce souhait présidentiel. Certes, mon sang ne s’est pas « glacé » comme celui de Simone Veil pour qui j’ai un immense respect, mais je n’ai tout simplement pas compris.
J’ai un fils de 6 ans, Alexandre. Pourquoi devrait-il porter, comme un fardeau trop lourd pour lui, les erreurs des autres, le poids d’une histoire.
Oui, des enfants ont été enlevés et conduit vers la nuit et le brouillard.
Oui, comme le dit très bien Emmanuelle Mignon, proche collaboratrice du Président, dans le JDD de ce matin , « les enfants palestiniens, vietnamiens, d’autres encore ont été victimes de conflits politiques, qui doivent et qui sont enseignés ; mais avec la Shoah, les enfants ont été victimes du racisme. En enseignant la mémoire de ce génocide, on prémunit toute la société contre ce fléau. »
Oui, cette période de notre histoire ne doit pas vivre qu’au travers des pages de livres, fussent-ils signé Primo Lévi ou Lanzmann .
Mais non, ce n’est pas aux enfants d’en porter le poids. Même si Nicolas Sarkozy estime que l’on « ne traumatise pas les enfants en leur faisant cadeau de la mémoire d’un pays », il est des cadeaux que l’on préfèrerait offrir aux adolescents et aux adultes. Et qu’à trop vivre dans son histoire, on en finit pas trop se regarder soi même. J’avais eu l’occasion d’aborder ce thème dans mon compte rendu de lecture de « La bâtarde d’Istambul ».
Il est vrai que dans cette affaire, Emmanuelle Mignon a des arguments de poids qu’elle livre au Journal du Dimanche :
« Quand Nicolas Sarkozy était ministre de l’Intérieur, il s’est énormément occupé des questions d’antisémitisme. On a beaucoup travaillé à l’époque sur le sujet, mais il y a un dossier sur lequel on avait du mal à avancer, c’était celui de l’enseignement de la Shoah. Cet enseignement est fondamental, mais l’Education nationale rencontre parfois des difficultés pour le mettre en œuvre, alors même que certains actes antisémites sont commis par des enfants de 10 ans contre des enfants de 10 ans. Devenu président de la République, Nicolas Sarkozy a souhaité qu’on travaille avec l’Education nationale et des représentants des institutions juives pour voir ce que l’on pourrait proposer sur le sujet.
(…) On entend bien sûr les critiques. C’est un dossier sur lequel il y a un vrai enjeu politique et éducatif. Certains enseignants ont du mal à aborder la Shoah devant leurs élèves, ne savent pas comment s’y prendre, expriment un désarroi croissant. Des comparaisons avec d’autres conflits surgissent. Le président de la République a la volonté très nette de ne pas céder sur cet enseignement. Non seulement on ne doit pas fléchir devant la difficulté, mais on doit aider les enseignants en leur donnant de nouvelles pistes et empêcher les amalgames entre la Shoah et d’autres drames. »
Pour moi, c’est le prototype même de la vraie fausse bonne idée. A moins que le Président n’ait voulu jeter un pavé dans la marre (« que tous les enfants de CM2 se voient confier la mémoire d’un des 11 000 enfants français victimes de la Shoah ») pour faire avancer l’enseignement de la mémoire d’un pays, notamment aux plus petits. Les prochains jours seront sûrement riches en rebondissements et en prises de paroles. Notamment, et très modestement, sur ce blog ! Votre avis ?
Tiens, en vous parlant de marché, j’en viens au pâté croûte, donc à Gérard Collomb et à Dominique Perben… Je sais, le lien est tenu, mais vous en saurez plus en cliquant ici et en lisant mon papier. Bon clic !
En fait la raison principale, outre le froid, pour mon forfait de rugby c'est que les deux potes avec qui je devais aller ont eu un empêchement de dernière minute.Te sachant présent, toi le premier accessit au concours Lyon People de l'élu le plus hype, j'aurais fait un effort.Je remarque quand même que quand je viens au stade, le LOU gagne moi au moins!
Ceci dit le froid ne p'as empéché de voguer à vélo vers ton arrondissement le soir, écharpe fuschia au vent pour aller diner au Messob.
Ah et puis fait gaffe, ça fait deux fois en quelques mois que tu met le meme titre à un billet de ton blog
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Pour le titre, c'est volontaire cher lecteur assidu !
Pour le match, d'habitude le Lou gagne, mais là, la présence de GG écharpe au vent a sûrement du troubler les joueurs ! ;-(
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il n'y est pour rien, son éclat était éclipsé par ta magnificence o aigle royal du 6e tel un Alain Delon auguste en césar au Pathé Vaise!tu es donc seul coupable!
http://www.romainblachier.fr
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XXI je ne connais que de nom, le LOU je m'en fiche, mais la Shoa est un vrai sujet de société.
A l'heure de la mondialisation qui a commencé au XVIème siècle comme le rappelle, à juste titre Edgar Morin (Les sept savoirs nécessaires à l'éducation) et non il y a deux ans, il reste encore beaucoup de chemin à faire pour que les différents habitants de la Terre deviennent des Terriens et finssent pas comprendre qu'à force de se taper dessus leur petite identité nationale (tribale ?) ne leur servira que d'épitaphe. Si l'évocation de la Shoa dans les écoles ne sert qu'à cela ce sera déjà un immense progrès de l'Homme.
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Entre la mairie du 1er arrondissement et l'Eglise de Scientologie, le pacte tacite de non agression va-t-il jusqu'à l'entente cordiale ?
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Cela me rappelle que Primo Levi s'étonnait que le martyre d'Anne Frank éclipsât celui de millions d'autres personnes. Ce qu'il justifiait : « Peut-être est-ce mieux ainsi. Si nous étions capables d'absorber la souffrance de toutes ces personnes, nous ne pourrions pas vivre ». À mon humble avis, Sarkozy eût dû méditer cette phrase.
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c'est un cousin
merci de l'info
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« sed re succumbere non oportebat uerbis gloriantem »
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Le président de la Fondation pour la mémoire de la Shoah David de Rothschild estime que le projet de Nicolas Sarkozy de confier la mémoire d'un enfant juif mort à chaque élève de CM2 est « généreux » mais « trop lourd à porter » et qu' »il faut l'affiner ».
Dans une interview au Figaro M. de Rothschild dit qu' »il apprécie l'intention généreuse » du président Sarkozy mais « on ne peut pas associer un enfant juif massacré à un enfant vivant. C'est trop lourd à porter ».
« Il faut, ajoute-t-il, travailler encore, affiner, écouter les instituteurs pour trouver comment mieux parler de la Shoah sans exposer les enfants à la morbidité. Les élèves peuvent travailler en groupe sur des destins d'enfants déportés. Il faut parler des Justes. C'est un exercice gratifiant ».
David de Rothschild, né en 1942, confie qu'il a « grandi dans le silence » et se souvient du « choc » qu'il a ressenti en découvrant le film « Nuit et Brouillard » (d'Alain Resnais). « Il est bon que les enfants soient sensibilisés tôt, dit-il. Ce n'est pas inutile dans une France qui n'a pas totalement accepté la société multiethnique ».
« Nous ne demandons pas aux autres de se repentir mais de savoir, dit-il encore. L'existence d'autres tragédies ne banalise pas la nôtre ».
Pour M. de Rothschild, M. Sarkozy « n'a pas agi par opportunisme » : « La Shoah ne rapporte pas de voix. La communauté juive est bien trop diverse politiquement et économiquement ».
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