7h30. L’hôtel de ville est déjà bien animé. Drucilla passe l’aspirateur dans le salon VIP. « Je suis responsable de tout l’étage, avec ma collègue Aiba« . Serpillière, aspirateur, chiffon à poussière, de 7h30 à 19h00. Un « petit métier » que bien peu de VIP verront lors de leur passage sous les ors de la maison commune.
Drucilla lance un dernier regard au salon VIP où les viennoiseries, cafés et autres jus d’orange commencent à recouvrir le buffet. Derrière un rideau, 70 couverts sont dressés. Je pique un pain russe en guise de salaire et fonce backstage. L’équipe du traiteur La Potinière prépare la première bonbonne de café. 20 litres d’un coup. Au menu du déjeuner des intervenants et autres VIP : diverses salades (de rouget, d’artichaut), gigot de 7 heures, saucisson brioché, dos de sandre… Je vous passe les desserts. « Nous servons de 8 heures à 21 heures. Les personnalités sont plutôt sympas. Le seul incident s’est produit avec le Général Jaruzelski qui a tenu à fumer son cigare dans le salon, importunant ses voisins. D’un réel sans gêne, dans un endroit classé monument historique. » Apparemment, son éducation reste à parfaire puisque l’aristo polonais, à table, avait l’air de croire que « les trois serveurs étaient à son entière disposition. » Fermez le banc, en voilà un habillé pour l’hiver polonais.
Drucilla passe l’aspirateur à quatre pattes dans le grand salon. Fernand fait les essais son. Essentiel, notamment pour la captation vidéo… Il est ravi. Depuis sa console, il écoute les débats. Son meilleur souvenir, l’intervention de Tadeusz Mazowiecki, premier ministre polonais non communiste de 1989 à 1990. Et puis l’ardu débat entre Eric Woerth et Didier Migaud.
Plus loin, dans le couloir qui mène au bureau de Gérard Collomb, je croise Jacques, agent de sécurité incendie. Il tourne depuis deux jours, surveillant les extincteurs, les poubelles, guettant un éventuel départ de feu. Pénètre-t-il dans le bureau du maire de Lyon ? « Non, la porte reste fermée… »
Eric, l’un des huissiers du cabinet du maire est là depuis 7h30. « Comme chaque jour », précise-t-il. Il accueille, oriente et fait la navette entre les différents bureaux. Il nous glisse que l’ancien rédacteur en chef de Lyon Libé, reconverti en chef de cabinet adjoint, Robert Marmoz, « n’est pas encore arrivé. Pas avant 9 heures ! » Robert n’a jamais été un matinal… On ne le changera pas !
Café-drague
Sarah, étudiante à l’ISCPA, est hôtesse d’accueil dans le salon des archives. Elle me confie « avoir du mal à se réveiller. Et pourtant, je me suis couchée à 10 heures ! » Il faut dire que rester toute la journée debout, à accueillir, à orienter, à sourire, à courir micro en main, à scanner les badges… est épuisant. Heureusement, Juliette vient en renfort. Il faut dire que ce matin, elles doivent en plus gérer les casques de traduction simultanée. Sabine, cheftaine de l’équipe, talkie-walkie en main, veille au grain. Pas question de draguer ses hôtesses ! Bon, tant pis. « Je suis responsable des salles 1, 2, 3 et 4 et du salon VIP. » Belle responsabilité pour cette étudiante en droit européen à Lyon 3. Arrive, sur ces entrefaits, mon camarade Olivier, responsable de l’ensemble du back-office (tentes, lumières, son, captation vidéo…). Il est ravi d’avoir remporté cet appel d’offres. « Pas de galère jusqu’à maintenant, cool », lâche-t-il, avant de poursuivre sa tournée des équipes.
Je descends par le plus ancien escalier de l’hôtel de ville, direction l’atrium. Derrière de grandes banques réfrigérées, Yann et Hubert (de chez Michéa Traiteur) attendent le client. Ici, quasiment en dessous du carré VIP, « all include », tout est payant. « Les plus grosses ventes, ce sont les paninis et les cafés… » Peu de VIP, hormis un ou deux adjoints au maire de Lyon. « On a de la concurrence à l’étage ! Heureusement, c’est ici que les hôtesses viennent déjeuner. C’est sympa, on peut engager la discussion autour d’un café. » Et dans ce cas, il est offert !
Retour au carré VIP qui se remplit peu à peu. Pas moins de trois personnes pour filtrer, listing en main. Elsa, étudiante en archi, est à la manœuvre. « Je suis chargée de les accueillir, de prendre leurs bagages et de leur remettre des cadeaux. Hier on avait un coffret de DVD, mais on est en rupture de stock. » Dommage pour Jack Lang et Frédéric Mitterrand, ils devront se contenter du tee-shirt officiel du Forum.
Christine Boutin se maquille, pendant que Jack Lang se recoiffe devant la glace. Il a négligemment jeté son sac en cuir tout mouillé (il pleut dehors) sur un canapé XIXè recouvert de soie. On fête la journée du patrimoine comme on peut !
Société du spectacle ?
Je passe la tête dans le bureau du premier adjoint. Pas de sécurité, pas de vigiles. Tout est désert. Même la machine à signer est éteinte… Retour au salon VIP.
Elisabeth Guigou, ravissante en noir, papote avec Christine Boutin, assise sur le bras d’un canapé. Boutin se retourne à mon passage et me lance un « bonjour » doublé d’un grand sourire. Sympa.
H-30. Ca coure dans les couloirs. Tout le monde a l’air super occupé, super concentré. Sauf moi. Je poursuis ma déambulation. Laury (encore une hôtesse, je sais !) semble en hypoglycémie. Je lui fais découvrir un passage off pour accéder aux cuisines VIP. Roland, sympa, lui prépare une assiette de viennoiseries et un café qu’elle file partager avec sa collègue Ségolène. Leur moment le plus fort ? « Lorsque Tadeusz Mazowiecki a viré le traducteur officiel de la tribune pour demander à l’un de ses collaborateurs de prendre la suite ! » Dans le grand salon désert, au cinquième rang, Laurène, lycéenne, attend les intervenants sur le thème « Quel avenir pour les Etats-nations ? » Elle voudrait faire Sciences-Po. « Paris si possible. » Dans ses mains, un livre de Guy Debord, « La société du spectacle ». Cet essai politique, paru en 1967, démarre par cette phrase : « Toute la vie des sociétés dans lesquelles règnent les conditions modernes de production s’annonce comme une immense accumulation de spectacles. » Selon Debord, le spectacle est le stade achevé du capitalisme. Le « spectacle » est à la fois l’appareil de propagande de l’emprise du capital sur les vies, aussi bien qu’un « rapport social entre des personnes médiatisées par des images ».
Pour Laurène, ces trois jours de débat sont « une manifestation de cette société du spectacle » dont elle est, elle-même, une spectatrice engagée !
Ça fleur bon l’ancien régime, Erick en Eugène Labiche nous décrit depuis l’arrière cuisine des vrais gens qui donnent le change à quelques ridicules bourgeois parvenus…
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C’est vraiment horrible cette atmosphère! Comparez avec ça:
C’est bon Coca-cola.
Mais je préfère du thé, s’il te plaît!
C’est bon du thé avec du méchoui,
Non?
Même avec du couscous
Je n’aime pas boire ce coca.
Ce que j’aime, moi, c’est
M’asseoir là, sous cet arganier,
Du rôti à la main
Et du thé;
Et, du fond du cœur de Radio Rabat,
Vient la voix de Rouicha
Chanter l’amour des montagnes.
Je ferme alors les yeux :
Je vois la neige et l’amour des sourds,
J’entends le guenbri pleurer à qui veut l’entendre;
Et je pense à mon âme jumelle,
Celle qui est là-bas à Rabat.
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il n’y a pas de sots métiers…….
il n’y que de sottes gens et pour ceux là on en connait un rayon
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