Les mots de l’Europe

Mon camarade Denis Muzet, le patron de l’institut Mediascopie, m’a fait parvenir l’étude « Les mots de l’Europe, Ce que les Français attendent de l’Europe » qu’il vient de publier à l’occasion du Forum. Impressions…

Comment les Français perçoivent-ils l’Europe à travers les mots qui sont employés pour en parler ? (La sélection a été effectuée à partir de l’analyse des mots les plus fréquemment employés par les médias pour parler de l’Europe). Une étude basée sur un échantillon représentatif de 300 Français réalisée en août.

Deux échelles différentes ont été analysées :

• une échelle de menace/protection, sur la base des critères opposés « ce mot me menace / ce mot me protège » ;

• une échelle d’importance pour l’avenir, sur la base des critères opposés « ce mot est moins déterminant pour l’avenir de l’Union européenne / ce mot est plus déterminant pour l’avenir de l’Union européenne ».

En synthèse : L’Europe reste un mélange de craintes et d’espoirs. La grande majorité des 100 “mots de l’Europe” sont perçus positivement. Ces mots les protègent plus qu’ils ne les menacent. La paix (mot jugé le plus protecteur parmi les 100 testés) reste la valeur en même temps que l’attente phare vis-à-vis de l’Union européenne. À l’opposé, du côté des menaces, le fascisme, les intégrismes et le terrorisme continuent d’inquiéter ; mais, aux peurs originelles de la guerre et des conflits, viennent s’en ajouter de nouvelles, qui ont nom immigration clandestine, discriminations, OGM, ou paradis fiscaux. La crise, quant à elle, inquiète, mais elle est un obstacle qu’on juge dépassable.

Six grandes attentes sont adressées à l’Europe :

• que soient pris en compte, d’abord, les impératifs du développement durable, dans sa double dimension, environnementale (le Sommet de Copenhague est d’ores et déjà attendu comme devant apporter une plus grande protection à l’Europe comme à la planète) et sociale (Europe sociale figure parmi les item les mieux notés)

• qu’elle favorise la paix et la démocratie : laïcité, citoyenneté européenne, opinion publique européenne, ou referendum européen sont parmi les mots les mieux notés ;

• qu’elle préserve pour chacun la possibilité d’un ancrage identitaire et culturel dans le local (produits AOC est le 3è mot le plus protecteur de tous), tout en permettant à l’individu de développer d’autres identités et échelles d’appartenance, nationale comme européenne ;

• qu’elle apporte davantage d’ordre et de sécurité, en matière de Justice, de Police, de Défense, de Politique étrangère, comme au plan de la vie quotidienne, en protégeant les consommateurs vis-à-vis des risques alimentaires par exemple ;

• qu’elle soit un moteur de la relance de l’économie. Les outils qu’elle a forgés pour encadrer, réguler et stimuler son économie et sa monnaie, sont plébiscités : plan de relance européen, Pacte de stabilité et de croissance, Euro ; et, davantage encore, politique européenne de recherche et d’innovation, item de la famille économique le mieux noté ;

• qu’elle facilite les échanges, la libre circulation des personnes, des biens et des services, et qu’elle permette ainsi de rapprocher les peuples et de renforcer le lien social, grâce à des modes de transports qui, tels le train, sont respectueux de l’environnement.

Encore faut-il mettre les moyens pour répondre à ces attentes. Traditionnellement méconnues, voire mal-aimées, les institutions européennes sont valorisées par nos compatriotes, autre enseignement fort de l’enquête (parmi elles, la Cour Européenne des Droits de l’Homme et la Cour de Justice des Communautés européennes sont jugées les plus protectrices, mais le Parlement européen et la Commission européenne le sont aussi). D’autre part, une Europe politique est attendue, au regard de la crise que nous traversons. Quant aux acteurs, si Barak Obama est jugé plus protecteur et plus déterminant pour l’avenir de l’Union que l’ensemble des dirigeants européens, et si, à l’inverse, Vladimir Poutine est jugé le plus menaçant, Nicolas Sarkozy est placé dans l’enquête en position médiane : il protège moyennement (4,8/10). En dépit de ses efforts et alors qu’il n’est plus président de l’Union, la démonstration de la capacité du chef de l’État à protéger les Français, des ravages de la finance en particulier, n’est à ce jour pas totalement faite. Enfin, la palme des acteurs de l’Europe revient à deux entités collectives, jugées les mieux à même de protéger nos concitoyens, en même temps que les plus déterminantes pour l’avenir : les députés européens et la Confédération Européenne des Syndicats. Confirmation de la double attente déjà pointée précédemment : attente d’une Europe démocratique, d’une part, attente d’une Europe sociale, capable de protéger les salariés, d’autre part.