Tunisie, Rome et Belgique. A des titres divers, ces trois pays (eh oui, dans Rome, il y a un tout petit Etat) ont fait la une de mon actualité ces derniers jours. Et sûrement de la votre, à une barbe près !
J’aurais du mal à vous commenter sur le fond la situation tunisienne. Si ce n’est que je m’étonne qu’un régime si bien structuré que celui de Ben Ali tombe en aussi peu de temps. Comme quoi, il ne faut jamais désespérer de la jeunesse. Et ne jamais la désespérer !
Mon ami Olivier de Kermel, directeur du Hilton Tunis, s’est transformé en AFP live via Facebook. Au cœur des événements, il commente les accalmies, son passage au marché et à la Marsa puis les retours de flammes conduits par des pillards, les coups de feu, les rondes dans le quartier avec les voisins, le démontage de l’enseigne de l’hôtel (le bâtiment est une propriété de la belle famille de Ben Ali, les Trabelsi qui font l’objet d’une véritable chasse à l’homme en raison de la main basse qu’ils ont fait sur l’économie tunisienne)…
Ce soir, à 17h30, Olivier poste depuis son Iphone :
« Nouveau couvre feu…
La journée a été calme ici, mais je viens d’avoir des amis au tel qui ont entendu encore des coups de feu cet après midi !
Je suis épuisé… Le rythme des derniers jours a été passionnant et très intense !
Demain et la semaine à venir vont encore être gourmands en énergie… »
En attendant, on ne peut que s’étonner de la faiblesse de notre diplomatie et de nos services de renseignement qui n’avaient apparemment rien vu venir… 28 jours ont été suffisants pour faire tomber 23 ans de règne ! Et nous n’avons pas su voir et décrypter.
Tiens, le mercredi 12 janvier, à J-2 du départ de Ben Ali. Michèle Alliot-Marie propose, à l’Assemblée nationale, le savoir-faire français à la police tunisienne pour « régler les situations sécuritaires » (…) Nous proposons effectivement aux deux pays [l'Algérie et la Tunisie] de permettre dans le cadre de nos coopérations d’agir pour que le droit de manifester puisse se faire en même temps que l’assurance de la sécurité. » Erreur d’appréciation qu’un ministère organisé n’aurait pas laissé commettre s’il avait été au fait des événements.
Vendredi, réunion de crise à l’Elysée. Brice Hortefeux (Intérieur), Michèle Alliot-Marie (Affaires étrangères), Alain Juppé (Défense) et le porte-parole François Baroin sont absents de Paris. Le Journal du Dimanche nous apprend que MAM, avant de partir pour Saint-Jean-de-Luz en fin de matinée vendredi, avait demandé à ses services si des urgences étaient attendues et qu’on lui avait répondu par la négative. Le JDD poursuit :
« L’absence de Paris des ministres concernés, alors que le feu gronde en Tunisie depuis plusieurs jours, en dit long sur la défaillance du renseignement et de la qualité des prévisions du Quai », s’emporte un diplomate, persuadé que Paris, « comme Mitterrand était passé à côté de la chute de l’empire soviétique », est passé à côté de la première révolution populaire dans un pays arabe. « Cela fait des années que l’on n’a pas pris la mesure des choses », confie l’ancien ambassadeur de France à Tunis, l’Amiral Jacques Lanxade.
Si la chute du régime de Ben Ali devait avoir des effets collatéraux dans d’autres pays, j’espère que la France saura les anticiper et mieux préparer ses arguments !
En attendant, qui pour demain ? C’est toujours la question qui fâche. Et pourtant, les révolutions ont toujours mis du temps à trouver un leader digne de ce nom. Certaines le cherchent d’ailleurs encore, ayant remplacé un enfer par un autre. L’opposition est désorganisée et il ne reste plus qu’à souhaiter que cette belle Tunisie ne s’offre pas au premier (mal) venu et qu’elle garde son intégrité laïque.
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On se souvient tous des banderoles « Santo subito », « canonisez-le tout de suite ! » lors des obsèques de Jean-Paul II. Une évidence pour toute une génération, la mienne, qui voyait dans ce Pape plus qu’un chef d’église, un symbole.
J’avais 14 ou 15 ans et des amis avaient réussi à me convaincre de participer à un pèlerinage à Rome. Je me souviens d’une dame dans le train. Elle m’expliquait que le simple fait de montrer une photo de JPII à son bébé suffisait à le calmer. Incrédule, il a fallu qu’elle me montre la chose… Pourquoi pas, où comment conditionner son enfant ! Jusqu’à ce que mon regard croise celui de ce pape de combat. J’étais au premier rang de l’audience papale, comme encadrant sécurité d’un groupe. Il est passé devant moi, m’a regardé comme il en regardait cent autres, mais la simple force de ce regard croisé ont suffit à transformer une incrédulité en émotion. A ma gauche, un enfant hurlait. D’un œil, je repère la mère de famille du train. Elle tend son bébé, le Pape le bénit. Et il se calme. Subito ! Ce n’était pas un miracle, juste un effet du hasard ou la force d’un regard. Allez savoir. Mais pour moi, comme pour tant d’autre, Santo subito ! Ce sera fait le 1er mai. Enfin !
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J’ai déjà eu l’occasion de vous en entretenir sur ce blog. La Belgique se déchire entre néerlandophones et francophones. Sept mois après les élections législatives du 13 juin, les partis flamands et francophones n’ont toujours pas réussi à former un nouveau gouvernement, faute d’accord sur une réforme des institutions du royaume accordant plus de pouvoirs aux régions que réclame la Flandre.
L’acteur belge Benoît Poelvoorde a suggéré à ses compatriotes de ne plus se raser « jusqu’à ce que la Belgique se relève » et soit dotée d’un gouvernement. « Ne soyez pas surpris par cette pilosité. Nous avons décidé de ne plus nous raser tant que nous n’aurons pas de gouvernement en Belgique », a déclaré à la télévision belge RTL-TVI l’acteur, arborant une barbe de quelques jours.
Une vidéo, loin d’être gag !
« Si tout les gens qui disent comme nous qu’il est grand temps que nous ayons un gouvernement et qu’il faut faire un petit effort chacun de son côté veulent se joindre à nous… », a déclaré Benoît Poelvoorde. « Laissez pousser votre barbe et nous saurons que nous sommes tous solidaires d’une Belgique unie et qui s’en sort, une Belgique au poil », ajoute l’acteur né à Namur. Là où se tient chaque année le Festival International du Film Francophone…
Pour suivre la pousse… de cette initiative, un site au poil vient d’être créé. D’un clic ici.
« Malheur aux Barbus » prophétisait déjà Pierre Dac et parfois comme un cousin Machin ou un oursin, il faut être de la famille et du bâtiment pour différencier l’envers du revers…
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ERdB Bonsoir,
Je rejoins tes réserves sur le romantisme ambiant entourant les évènements tunisiens.
Un pays aussi policier qui tue suffisamment de manifestants pour discréditer un président vieillissant et affaibli et insuffisamment pour écraser la révolte alors qu’il s’est organisé « au quotidien » pour faire face à ce type d’événements.
Une Epouse honnie qui ne revient pas depuis fin décembre d’un séminaire à Dubai. Un pouvoir qui change de tête de façon feutrée 3 fois en moins de 24 heures, une police omniprésente et en sur-effectif qui disparait comme par enchantement au même moment…
Des hordes sauvages qui sèment la terreur opportunément pour cantonner la population chez elle. Quelques symboles mis à terre et une belle famille présidentielle désignée à la vindicte populaire (histoire de ne pas frontalement trop heurter les partisans de l’ex président…
Pendant ce temps, ni ministères ni gouvernement ni tv prises d’assaut et Internet et les portables qui fonctionnement presque mieux que d’habitude alors qu’ils sont en de bonnes mains.
La suite, un premier ministre peut être sorti trop tôt du bois qui va faire un gouvernement fourre tout (l’opposition est très parcellisée et hétéroclite) et qui pourrait bien vite et là aussi opportunément apparaître comme un rempart contre un bordel ambiant dont les Tunisiens auront vite marre et que déteste la communauté internationale dans un pays qui héberge tant de ses ressortissants.
L’attitude facialement hésitante (bourde Alliot Marie mise à part) de la France n’est peut être pas aussi inadaptée qu’il n’y parait pour une révolution qui présente quand même beaucoup de symptômes de coup d’état d’une faction plus libérale de l’entourage politique de Ben Ali.
A suivre.
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Madame Ben Ali étant opportunément partie en décembre avec 1,5 tonne d’or. De quoi voir venir !
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TUNISIE ,
Les tunisiens dans leur grande majorité étaient près si le moment venait de faire leur révolution : voir les avocats , les artistes , etcetc
Non , Madame était là encore jeudi jusqu’à midi et pas à Dubaï .
Ben ali a été lâché par l’armée qui ne voulait pas tirer sur la foule .L’armée est exemplaire .
Les autres membres du clan n’avaient pas prévus un fin aussi rapide , d’où de nombreux arrêtés .
Imed a bien pris un coup de couteau de la part d’un de ses sbires plusieurs jours avant la chute : une source me dit pcq impliqué dans le rapt d’un petit au mois de nov : était gardé par 80 pers dans une aile spécialement réservée de l’hôpital militaire .
Tout ce qui a brûlé était ciblé // proches du régime : famille et grandes familles qui soutenaient .pas les autres .
une partie du pillage = la faim , le fait de ne rien avoir , avec l’opulence sous les yeux .
une autre partie était de la part des milices de ben ali : autant de policiers en Tunisie qu’en France : c’est plutôt les Tunisiens qui pourraient aider Michèle Alliot Marie !
Oui en partant , et en donnant l’interim à Ghannouchi il pensait semer la terreur , faire un coup d’état et revenir .
L’armée prenait d’assaut hier soir le Palais où des centaines de policiers fidèles à Ben ali sont retranchés .
Pour les Tunsiiens que je connais c’est une question de qques jours pour que tout soit définitivement fini .
La Maison du président à sidi a brûlée vers 2h30 du mat : fumée âcre jusqu’à gammarth . ma voisine , amie d’Olivier de Kermel voyait tt de sa terrasse .
Le marché de gros de ben arous a refonctionné hier mat .
Notre boucher nous a dit : j’ai de la viande au frigo , je réouvre demain lundi .
les Tunisiens ont regretté l’attitude de la France .
Les Tunisiens ne veulent pas que les français partent .
Et surtout les Tunisiens ne veulent pas des barbus .
L’aide de l’UE est primordiale pour redémarrer .
pour + d’infos Eric a nos coordonnées .
Inch Allah!
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Merci PM pour ce témoignage depuis la Tunisie. Prenez soin de vous…
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Lu dans Le Figaro…
Le conseiller spécial du président Nicolas Sarkozy, Henri Guaino a admis aujourd’hui qu »il y ait pu avoir des maladresses ou des incompréhensions », de la part de la France face à la crise en Tunisie, mais que « personne ne pouvait prévoir que les choses iraient aussi vite ». « Que vouliez-vous faire? Personne ne pouvait prévoir que les choses allaient aller aussi vite (…), aussi loin, et qu’elles seraient aussi rapidement dramatiques », a-t-il déclaré sur RTL, interrogé sur les critiques sur l’attentisme du gouvernement français face à l’insurrection populaire en Tunisie ayant conduit à la chute du régime du président Zine El Abidine Ben Ali.
« Qu’il y ait pu y avoir des maladresses ou des incompréhensions, après tout cela est possible » mais « imaginez que la France intervienne dans les affaires d’un pays qui est un ancien protectorat français, qu’aurait-on dit? », a demandé le conseiller du chef de l’Etat, jugeant que « ça n’est pas à la France d’être le gendarme de la Méditerranée ». « J’entends bien les jugements des uns et des autres » mais « c’est très difficile pour des gouvernements de ne pas tenir compte des situations de fait, de ne pas dialoguer, coopérer avec des gouvernements qui sont en place », a-t-il plaidé.
Selon lui, c’est d’autant plus difficile « dans des pays vis-à-vis desquels nous entretenons des relations qui sont à peine de la politique étrangère. La Tunisie, le Maroc, l’Algérie c’est presque un problème de politique intérieure pour la France, tellement les liens sont profonds, étroits », a-t-il fait valoir. « C’est quand même assez compliqué de voir les mêmes qui ont condamné l’intervention en Irak et qui maintenant demandent d’intervenir dans tous les pays », a-t-il dit lancé à l’adresse de l’opposition.
Quant à la ministre des Affaires étrangères Michèle Alliot-Marie qui avait proposé à la Tunisie le savoir-faire de la France pour « régler les situations sécuritaires », il a déclaré : « je crois qu’elle l’a fait sans mauvaise intention du tout, à partir d’une analyse qui était la sienne ». Quant à savoir si elle doit présenter des excuses, « vous lui poserez la question », a-t-il dit.
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rions un peu….
c’est bien gentil de se laisser pousser la barbe afin d’inciter la nomination d’un gouvernement en Belgique mais les femmes elles manifestent comment! elles se laissent pousser les poils sous les bras!!!!
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Très bel article. Le rapprochement de ces trois évènements est très heureux et l’impératif de l’espérance (hyper active bien sûr !) s’en dégage.
Mes meilleurs voeux à vous et tous ceux qui vous sont chers.
G. D.
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@ Charlotte : au poil ta remarque ! Mais il me semble que c’est une coutume du Sud. Tente les cheveux !
@ Guillaume : merci. Très bonne année à vous aussi. Emplie d’éclats de rire !
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Bonsoir,
L’important dans tout ça est que la politique ne devienne pas barbante et c’est pas gagné.
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