On s’attendait à du spectacle, on peut dire que l’on est servi. Une semaine riche en rebondissements, coups de théâtres et autres surprises. Les journalistes ne savaient plus où donner du micro et les plans médias tombaient à l’eau les uns après les autres. Vous avez aimé cette semaine, vous allez adorer les prochains mois de la Présidentielle(s).
Pourquoi ce (s) à mon titre, tout simplement parce que l’on a l’impression de voir plusieurs campagnes se dérouler en parallèle. Avant le grand saut de la campagne (la vraie), en début d’année prochaine. Témoin cette folle semaine…
Lundi, Nicolas Sarkozy démarre la semaine par une conférence de presse d’importance. Compétitivité et Grand emprunt sont au programme. Pour une enveloppe de 20 milliards d’euros répartie entre les universités, les laboratoires de recherche et les entreprises innovantes. Une grande partie de cette somme est investie en fonds propres : ce ne sont donc que les intérêts qui seront dépensés chaque année par les structures auxquelles ils sont alloués. Autre particularité, les postulants à la manne publique ont été priés de mobiliser conjointement des fonds privés de façon à donner au grand emprunt un effet de levier de 60 milliards d’euros. René Ricol, Commissariat général à l’investissement, a même confié la sélection des 1500 projets reçus à des jurys internationaux indépendants afin d’échapper à toutes les pressions. Quitte à froisser certains pontes ou mandarins qui pensaient que la fonction faisait la dotation !
En vérité, il y avait de quoi occuper les journalistes durant quelques jours et permettre aux hebdos de faire des papiers à la gloire de la France de demain.
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Mardi. Martine Aubry se lance et promet « la victoire » à ses troupes. Elle a raison, il faut toujours y croire. Même quand c’est difficile… Témoin ses audiences à la télé. Son apparition sur TF1 le 16 juin a incité 900 000 spectateurs à se jeter sur la télécommande. Ne zappez pas pourrait être son prochain slogan de campagne ! Justement, l’actu l’a zappée en force avec l’élection de Christine Lagarde au FMI. En voici deux qui peuvent dire merci à DSK. Martine avait refusé les JT de TF1 et de France 2, elle doit s’en mordre les doigts. La reine Christine est donc couronnée par les journaux de 20 heures et Martine se contente d’être à la traine.
Mardi encore. J’achète à Poitiers un livre à la couverture rouge : « Dans l’ombre » (JC Lattes – 21,50 euros). Il démarre fort !
« Je suis un apparatchik. (..) Dans mon monde, les politiques et les apparatchiks vivent ensemble. Ni les uns, ni les autres ne peuvent survivre seuls. (…) L’apparatchik, c’est un guerrier qui sert un maître, un professionnel qui connaît son milieu, qui utilise ses armes, qui pare les coups qu’on veut porter à son patron. C’est un mécanicien, un organisateur, un inspirateur, un souffleur. C’est le bras, les oreilles, les jambes et parfois le cerveau du politique.
Un politique, c’est autre chose. C’est une capacité à incarner, une volonté de projection vers les autres, une empathie animale, une énergie constante (…) Un politique ne vit que lorsqu’il est regardé, lorsqu’il est écouté, et lorsqu’il doit convaincre. (…) Je n’en connais pas qui se pense inutile. Ou qui conçoive que quelqu’un d’autre ferait mieux. Aussi bien, c’est peu envisageable. Mieux, c’est impossible. »
Après la victoire de son « patron » à la primaire, le premier conseiller s’engage avec corps et âme dans la campagne présidentielle. Chacun connaît son rôle : Marilyn, l’attachée de presse, la Valkyrie, organisatrice des meetings, le petit Caligny, le plus jeune des conseillers, le Major, le directeur de campagne, et Démosthène, l’intellectuel, qui rédige les discours. Le Conseiller a sacrifié sa vie pour ce moment et ce combat. Il croyait tout connaître de son rôle, jusqu’aux compromis et aux renoncements. Mais rien ne pouvait le préparer à ces mois de campagne, aux trahisons dont seuls sont capables ceux qui convoitent à tout prix le pouvoir. Surtout, il doit faire face aux soupçons de fraude qui entachent la victoire de son patron à la primaire et qui pour la première fois l’oblige à questionner l’honnêteté de son candidat et par là même le sens de cette vie militante.
Un livre qui m’a tenu en haleine durant les 5 heures de TGV et le début de la soirée. 656 pages d’un portrait de haute volée, en cœur du système politique, avec des portraits saisissants de vérité (toute ressemblance…) et des anecdotes qui sentent le vécu (je m’y suis souvent retrouvé). Un livre à déconseiller à ceux qui sont allergiques à la politique. Pour les autres, direction la librairie la plus proche ! Les auteurs : Edouard Philippe, 40 ans, avocat, est maire du Havre depuis 2010. Membre du Conseil d’Etat, il a dirigé pendant deux ans l’UMP. Gilles Boyer, 39 ans, est un des hommes clés de la galaxie Juppé qui alterne des allers retours entre le privé (M6 notamment) et les cabinets ministériels. Il est conseiller auprès du ministre des Affaires Etrangères. Deux pros donc !
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Mercredi. Eva Joly créée la surprise. Avec 49,75% des suffrages exprimés, elle arrive largement en tête pour le premier tour de la primaire des écologistes, ratant ainsi la majorité absolue de 63 petites voix. Bien que donné favori ces quinze derniers jours dans les enquêtes d’opinion, et soutenu par la patronne des Verts, par José Bové et Daniel Cohn-Bendit, Nicolas Hulot a recueilli 40,22% des votes.
J’en discutais vendredi avec un responsable écologiste lyonnais qui, avec humour, n’excluait pas que les écolos votent dans l’autre sens lors du second tour ! Girouettes ? Je ne le pense pas. Les militants ont simplement choisi la ligne dure, intransigeante, montrant une fois encore l’incapacité des Verts, après l’échec d’Europe Ecologie Les Verts, d’ouvrir largement leurs idées. Dommage pour eux. Et une bonne claque pour Hulot, démontrant une fois de plus qu’un sondage ou une présence médiatique forte ne fait pas une élection.
Remaniement en fin de journée. Pas grand chose à dire si ce n’est le caprice (réussi) de Baroin. Heureusement, cette séquence médiatique bien médiocre est passée aux oubliettes par la libération des deux otages journalistes de France 3. Joie dans les cœurs. On espère seulement que les journaux continueront à parler des autres otages français dans le monde. Ils sont 9 et, aux différents journaux télé, on n’en parle jamais. Il faut dire qu’ils n’ont pas de carte de presse ! Saluons l’engagement des services secrets français dans cette affaire et des militaires présents en Afghanistan !
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Jeudi. La matinée est consacrée à l’arrivée des otages en France et à la discrétion de Sarkozy, fidèle à sa nouvelle stratégie d’abstinence médiatique. Il n’en profite pas (encore) dans les sondages… Albert Algoud et le dessinateur Herlé ont parodié l’album de BD culte « Où est Charlie ? » en créant « Où est Sarko ? » (Editions de l’Opportun). Ou comment repérer le Président dans les décors qui ont marqué le quinquennat ! Rassurez-vous, on y retrouve un Sarkozy omniprésent. Soit 244 fois en 20 planches !
Faute de nouveaux rebondissements et d’infos, les journalistes se congratulent. Et le Président se fait tirer par la manche. Il parait que le coup de poing allait partir. De quoi faire la seconde info de la journée. Avant le mariage princier. Bref, la présidentielle s’éloigne.
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Vendredi. On oublie les otages d’Afghanistan et on revient à la prison 12 étoiles de DSK. Depuis 5h00 du matin, l’info vient des USA. DSK serait la véritable victime. Et les commentateurs de commenter en boucle l’incroyable. Au risque de dire l’inverse de la semaine précédente. La palme revenant au Figaro qui titre à la Une : « L’heure où tout a basculé pour DSK ». Un article à contretemps, comme cela arrive parfois. Mais le quotidien était déjà en distribution lorsque l’info est tombée.
DSK à toutes les sauces ce vendredi, ce samedi et ce dimanche. DSK au restaurant, DSK dans une voiture, DSK qui sourit, DSK qui mange… Le balancier est parti dans l’autre sens et la presse, toute à la recherche de l’actu, reprend sa course folle sans se remettre en question. Et les commentateurs commentent. La victime a changé de camp et DSK est passé de serial violeur à serial niqueur. Pas de quoi fouetter un chat semblent dire les politiques qui attendent le retour de l’ex-patron du FMI en sauveur.
D’après les experts, DSK pourrait bénéficier d’un non lieu le 18 juillet. Pour Kenneth Thompson, l’avocat de Nafissatou Diallo : « Nous pensons que le procureur du district pose les fondements d’un non-lieu ». Pour le JDD : Il n’y aura sans doute jamais de procès de Dominique Strauss-Kahn. Certes, la justice de New York maintien, à l’heure qu’il est, ses accusations contre l’ancien patron du FMI. Certes, Thompson tente toujours de soutenir sa cliente, répétant que celle-ci a bien été violée, donnant même des détails, très crus, sur l’agression supposée : le ligament de l’épaule froissé, les seins empoignés, le vagin écorché,…
Mais en dévoilant ces blessures, Thompson montre qu’il mise, lui aussi, sur une issue très rapide du procès pénal. « Son agressivité a pour but de faire peur à DSK, décrypte Ron Soffer, avocat inscrit au bureau de New York et de Paris. Il veut faire croire qu’il peut toujours engager des poursuites au civil. Il essaie aussi sans doute de préparer un arrangement financier secret avec la défense. Même si Strauss-Kahn est innocenté pénalement, il n’aura pas très envie de revenir dans six mois s’expliquer devant un tribunal sur l’épisode de la suite 2806. »
Bref, DSK le retour est une hypothèse qui prend jour après jour une certaine résonance. De quoi donner des sueurs froides à l’ensemble de la classe politique. A droite comme à gauche.
On n’a pas fini de s’amuser à décrypter la présidentielle (s)
« Il y a tellement de rebondissements dans mes livres qu’on les croirait en caoutchouc. » Frédéric Dard
Anne Sinclair, se présente aux primaires PS, les Hollande se rabibochent, Désir dit un truc intelligent… Nos politiques n’ont pas fini de donner de la penne aux truffes…
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et ta venue à Tribune dans l’équipe des chroniqueurs aidera sans nul doute le décryptage ami Erick
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Ah ah, Romain a vendu la mèche…
En effet, je rejoins l’équipe des chroniqueurs (rien à voir avec DSK !) de Tribune de Lyon. Premier papier dans le numéro de jeudi sous le titre de « 3, bonjour les dégâts ! »
Je compte sur vous pour acheter Tribune de Lyon. Ou le voler !
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« Et ce dimanche soir … » Le Pingre se rebiffe ! » quand on consomme,on paie …En général c’est même avant de consommer …comme quoi il y a vraiment peu de professionnalisme dans tout ca ! »
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On ira chercher la vérité au fond du puit et professionalisme à la Tribune de Lyon
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parti comme c’est parti, je ne voudrai pas être bookmaker : qui de DSK ou de CYRUS VANCE JUNIOR va faire le meilleur SCORE pour son élection….
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Bonjour Erick,
ça serait bien que Tribune de Lyon pense à vendre ses articles en ligne au feuillet car il y a du bon, du mauvais et du pire encore … Si tu y vas de ta contribution hebdomadaire, tu vas probablement relevé le niveau mais ça serait mieux s’ils te donnaient les clés de la boutique pour avoir un magazine teinté de talent, d’une pointe d’irrévérence, d’un soupçon d’humour et d’une dextérité de plume.
Pour le dernier numéro, mon prix n’aurait pas excédé 5 centimes si je l’avais acheté …
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argh! *relever*
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La complote de Big Apple et la Turbine de Collyon, une recette qui fait recette.
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Welcome en tous cas
Briavel les contributions ne sont pas hebdos mais une fois chaque trois semaines.
Ce jeudi Erick se dépucéle puis ce sera au tour de Neyret puis de moi…sauf qu’il y a une interruption des chroniques pendant l’été. Pour ce qui est de Tribune je trouve le titre plus intéressant qu’il y a un ou deux ans et Mailhes a souvent de l’humour. Après des articles moins nombreux mais plus denses feraient à mon sens gagner un peu d’épaisseur au journal.
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François Mailhes est indiscutablement une excellente plume. De même que François Sapy (son édito est bien souvent un coup d’épée redoutable). Il faut maintenant que le titre gagne effectivement en densité, avec des journalistes à la bille (eh oui, la plume a disparu à Lyon contrairement à NYC) frétillante et dérangeante.
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Nous allons laisser les chroniqueurs professionnels,les Noleau-Zemmour de la « Tribune »disserter entre eux….
Plus de place pour les amateurs! mais on volera La Tribune.
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15 octobre 1959
Le sénateur de la Nièvre est victime d’un attentat rue de l’Observatoire à Paris. Alors qu’il rentrait à son domicile, sa 403 est prise pour cible par des tireurs armés de pistolets mitrailleurs. François Mitterrand, qui avait eu le temps de sauter de sa voiture, ressort indemne de cet attentat. Le lendemain l’événement fera la une de tous les journaux. Mais trois jours plus tard, l’un des tireurs, Robert Pesquet, passe aux aveux et affirme avoir été mandaté par Mitterrand lui-même. Le « faux attentat » était, pour le futur président de la République, une manière de regagner les faveurs de l’opinion publique. Ecroué, Mitterrand bénéficiera d’un non-lieu.
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Intéressant papier. Bon je ne sais pas si je vais adorer la course à la présidentielle, cette bataille d’égos surmontant le débat d’idées me fatigue déjà. Mais oui, il y aura de quoi occuper au moins les journalistes… et les politiques!
Et puis comme tu dis: « on espère seulement que les journaux continueront à parler des autres otages français dans le monde »…
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