Elysée. Le mot fait rêver. Déjà Virgile et Homère le décrivaient comme le séjour des héros et des hommes vertueux après leur mort et la traversée des fleuves du Styx et de l’Archéron. Un lieu inaccessible pour le commun des mortels. C’est peut être pour cela qu’ils se décarcassent tant pour y entrer…
Le Journal du Dimanche titre à la Une : « L’abstention fera-t-elle l’élection ? », s’appuyant sur un sondage Ifop qui montre que 70% des français estiment que la course à l’Elysée ne se déroule pas dans « un climat serein et respectueux ». Il faut dire que les noms d’oiseaux fusent. Mais il suffit de se plonger dans le récent livre « Président, poil aux dents, 150 ans de caricatures présidentielles » (de Guillaume Doizy et Didier Porte, chez Flamarion) pour s’apercevoir que certains dessins de presse (dont un excellent caricaturant Giscard en b…) étaient bien au-delà de l’irrespect. Et qu’ils ne seraient pas publiés aujourd’hui.
Alors oui, la campagne a pris, à gauche comme à droite, une dimension de cour d’école, ou de « combat de coqs » comme le dénonce François Bayrou. Trop de testostérone tue parfois l’argument, d’autant que les deux camps se rejettent la faute au jeu du « c’est pas moi, c’est lui, m’dame ». Même si, toujours dans le sondage, 64% des personnes interrogées déclarent que la campagne « aborde des sujets qui les intéressent ».
Tout l’enjeu est aujourd’hui, alors que les socles semblent être cristalisés, de convaincre les abstentionnistes et les « fans » des autres candidats de changer leur choix de 1er tour. Ou au pire, de voter pour les deux potentiels qualifiés du second tour. En 2002, 28% des électeurs ne s’étaient pas déplacés pour un second tour original qui voyait un Chirac ultra-favori face au géniteur de Marine Le Pen. Et si à cette élection, les électeurs de la fille, de Mélenchon et de Bayrou choisissaient le vote blanc ou la pèche ? Voilà qui serait inquiétant pour Nicolas Sarkozy qui doit aujourd’hui rattraper un fort retard au second tour, écartelé entre le centre et l’extrême. C’était d’ailleurs le titre d’un papier de l’Express paru le 23 avril 2007. Il y a tout juste 5 ans, quelques jours après le premier tour des présidentielles. On ne se refait pas !
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L’Elysée est le lieu de tous les phantasmes… Pour l’écrivain Denis Tillinac, habitué de la chiraquie, « c’est une maison de famille dont l’exiguïté prédispose aux macérations névrotiques. Des haines à la Mauriac peuvent y cuire à l’étouffée. »
Je viens de terminer un livre remarquable qui, au travers d’un abécédaire de 176 mots, raconte « Les coulisses et secrets d’un palais » (Plon). A la manœuvre, soulevant le lourd rideau qui sépare le commun de l’élite, Patrice Duhamel qui a bien connu le palais sous VGE et après, comme journaliste et dirigeant de France Télévision, et Jacques Santamaria, réalisateur et scénariste de talent.
176 mots, d’Académie Française à week-end, qui brossent une histoire (avec un petit h) et des moments d’Histoire de France. Mais, plus encore que l’anecdote dont le livre foisonne – comme celles d’Henriette Poincaré « enlevée » dans le parc du palais par un chimpanzé échappé d’un immeuble voisin, du canard surnommé « bébé » qui suivait Jules Grévy comme un labrador, ou encore du passage souterrain imaginé par Napoléon III pour rejoindre son amante Marie-Louise de Mercy-Argenteau -, c’est l’intendance qui fascine. « C’est l’exemple parfait de ce qu’on appelle l’excellence à la française, reconnaît Patrice Duhamel. Une entreprise prospère, et 100 % made in France ». Archivistes, argentiers, chauffagistes, chauffeurs, cuisiniers, ébénistes, électriciens, hommes et femmes de ménage, fleuristes, jardiniers, horlogers, huissiers, infirmières, lingères, lustriers, sommeliers, tapissiers… Environ 900 employés en tout.
Ce livre sera aussi utile à tous ceux qui se demandent pourquoi Félix Faure exigeait que sa femme marche à deux pas derrière lui ; quel était le président qui montait aux arbres en faisant le cri du corbeau ; en quelles circonstances le général de Gaulle abrégea sèchement un Conseil des ministres ; quels travaux Georges Pompidou fit entreprendre au sous-sol du jardin d’hiver ; en quelle occasion Valéry Giscard d’Estaing constata qu’on avait dérobé des pièces de robinetterie ; à quoi François Mitterrand consacra sa soirée du 29 mars 1993 ; devant qui Jacques Chirac poussa un coup de gueule à faire trembler les murs du palais ; quel interlocuteur Nicolas Sarkozy bombarda d’appels un soir d’avril 2011 ; et ce qui décida Carla Bruni-Sarkozy à recevoir ses invités un verre de bière à la main…
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Je reviens de l’expo Robert Combas (Greatest hits) au Musée d’Art Contemporain. Quel rapport avec l’Elysée ? Aucun… Quoique l’artiste exposera du 18 au 22 octobre lors de Art Elysées, à Paris. Un peu tiré par les cheveux ? Certes, mais c’est à l’image de cette exposition, à la fois rock et colorée.
Déroutant au début, on entre progressivement dans l’univers de ce peintre d’origine lyonnaise, même si son regard reste marqué par Sète où il a passé son enfance. Partout, la musique est présente, soulignant d’une série de notes les toiles et les sculptures.
Couleurs criardes, personnages tordus et grimaçants, monstres braillards, dégoulinures, sexe, (drogue ?) et rock’n roll sont au programme. Avec des toiles à mi-chemin entre vitrail et bandes dessinées, parfois foisonnantes de textes, de dessins et de références. J’ai particulièrement aimé un tableau 100% noir, comme oublié dans un escalier entre le 2e et le troisième étage. Il représente un cheval et prouve que le noir, tout comme le blanc, est une couleur. Très didactique, l’exposition est organisée autour de thématiques. Celle de la religion sonne juste, donnant beaucoup de profondeur aux toiles, dont un extraordinaire calvaire. Dans la pièce à côté, un superbe vitrail, « Le dormeur du val » en photo en tête de l’article, réveille l’espace plongé dans la pénombre.
Dans une pièce, un tableau de fanfare (La fanfare du Ragelade, en photo ci-contre) fait réagir ma fille. « A moi ! » lance-t-elle à tue-tête. Elle l’avait déjà repéré dans la plaquette… Elle a bon goût. Un peu cher peut-être. A moins que des lecteurs de mon blog ne lancent une souscription pour le racheter à la Fondation Cartier !
L’exposition lyonnaise permet de voir l’artiste improviser : le Mac a créé un atelier au cœur même de l’expo. Derrière des vitres, Combas peint, joue de la musique, réfléchit, sous l’œil des visiteurs et, nous assure-t-on, sortira même parfois pour dialoguer avec le public ! Ou quand l’artiste sort de son Elysée pour rejoindre le commun des mortels…
« Elysée, Moi ? » ERB
Combas est le Damin de l’enseignant de plus de 40 ans.
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A ceci près
- que Damin aura sûrement plus marqué l’histoire de l’art par ses premières toiles (magnifiques) que par ses paysages de Lyon destinés aux touristes en mal de cartes postales et aux Lyonnais qui croient aimer l’art alors qu’ils en achètent le plus pompier d’entre eux
- que Damin est loin, très loin, très très loin de la cote de Combas.
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« Sarkozy, c’est le seul qui a été obligé de passer par l’Elysée pour devenir premier ministre. »
Citation de Jean-Louis Borloo, Prix Press club humour et politique 2008.
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L’Elysée est un espace de liberté et de contact direct entre les comédiens et le public…
C’est pas moi qui le dit, c’est ici.. http://lelysee.com/
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