Après la fracture sociale, la fracture spatiale

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Le premier tour de l’élection présidentielle, avec le score de Marine Le Pen, a déclenché une course à la dédiabolisation des votes FN. Pour mieux gagner dimanche… Mais quel que soit le vainqueur, les politiques n’échapperont pas à une analyse sociale et spatiale de ces 6,4 millions de votes. Et aux réponses qui s’imposent.

Dans les grandes agglomérations et leurs banlieues, où se concentrent les difficultés sociales, le vote Marine Le Pen est souvent nettement inférieur à la moyenne nationale (comme à Lyon, Villeurbanne, Rillieux, Vaulx-en-Velin…), alors que dans le monde périurbain et rural, elle obtient ses meilleurs résultats, dépassant souvent les 20 % comme à Corbas, Mions ou dans le Haut-Beaujolais. Ainsi, une nouvelle géographie des territoires se dessine. Derrière le périph symbolisait le monde des années 70. Aujourd’hui, une population allant des ouvriers aux classes moyennes investit ces espaces situés à l’écart du développement métropolitain, dans des territoires dits périurbains. Sorte de France de la relégation sociale et spatiale. C’est ce que montre une analyse de l’Ifop sur l’enjeu du « grand périurbain », les zones situées entre 30 et 100 km des métropoles.

Des métropoles qui sont de plus en plus l’apanage de populations aisées, prix du mètre carré oblige. Cette relégation en grande périphérie est donc souvent subie. Or plus la résidence est éloignée du centre de la métropole, plus le vote FN monte.

L’autre clivage entre centre et périphérie sépare les gagnants des perdants de la mondialisation. Les crises politiques, sociales et économiques, et leur corolaire, la crainte de perdre une identité face au nivellement induit par la mondialisation, ont toujours favorisé les extrêmes. Les dernières élections locales dans de nombreux pays européens en témoignent. Ceux qui ont le sentiment d’être les perdants sont souvent surreprésentés en grande périphérie. Ils ont été sensibles aux discours sur le protectionnisme et la dés­industrialisation. Un signal a été lancé par Marine Le Pen dans son discours sur les « invi­sibles », cette France qui souffre en silence, captant ainsi leur désarroi, lui donnant un sens. Une thématique qu’avait su parfaitement exprimer Nicolas Sarkozy il y a 5 ans et qu’il a peiné à incarner en 2012.

Aujourd’hui, 77% des Français habitent en ville. Sur 20% du territoire. Un chiffre qui augmente par la simple mécanique de l’absorption dans l’espace urbain d’anciennes communes rurales. L’un des enjeux de la métropolisation, donc du monde politique, va être de réfléchir sur ce vivre ensemble, sur cette ville à vivre, et sur la notion même de Nation. Car si la crise et la mondialisation semblent nous échapper, la construction d’un territoire de vie commune, socle de la Nation, reste un ciment à la fois social et spatial. Ou, pour paraphraser Renan, comment retrouver un élan commun à vouloir se rendre ensemble quelque part ?

Chronique parue dans Tribune de Lyon du 3 mai 2012

Les Commentaires ( 6 )

  1. de Jérôme Manin
    posté le 4 mai 2012

    Considérez aussi la fracture légale entre les ressortissant du droit public et du droit privé, et la fracture idéologique entre les revenus issus de la collectivité (statut) ou d’une autre source.

    Exercice : Placez votre Fracture sur un repère avec
    - en abscisse : statut —- contrat libre
    - en ordonné classe sociale —- territoire

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  2. de Caton de Lyon
    posté le 4 mai 2012

    La fracture spatiale…
    …mais c’est du Cheminade dans le texte…

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  3. de mordejalousie
    posté le 5 mai 2012

    Et dire que personne n’a songé à féliciter Erick pour sa brillante promotion dans l’ordre du Mérite National. A défaut de rougir, le voilà donc qui joue les Stroumphs en virant au bleu. Reste à savoir combien il a fallu faire de courbettes aux puissants en place, en fréquentant assidûment les cocktails pour espérer avoir la chance de voir son portrait dans Lyon People ou figurer dans le blog de Gisèle Plumard qui est aux mondanités ce que Rivalta est à l’honnêteté. Erick chevalier, on attend maintenant qu’il fende l’armure

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  4. posté le 5 mai 2012

    Merci mordejalousie… Et dans courbette, il y a Cour et…
    Ceci dit, avant de la fendre, il va falloir que j’en trouve une à ma taille au grenier !

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  5. de enpolitiquecom
    posté le 23 mai 2012

    Vous avez suivi la campagne présidentielle française en ligne, avez discuté, échangé de l’information ? Votre avis nous intéresse !
    Participez à notre enquête en ligne http://enquetes.enpolitique.com/s/France2012/?pe=56101

    Nous vous invitons également à diffuser le sondage auprès de vos contacts.
    Merci de votre participation !
    projet@enpolitique.com

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  6. de jerome manin
    posté le 26 mai 2012

    @Erick. Tu ne fais un petit pince-fesses pour la fermeture de ce bog ?

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