C’est un de mes derniers billets de l’année… Les 12 mois passés auront contribué, j’allais écrire une année de plus, à discréditer la classe politique. Hélas ! Thévenoud, Cahuzac, Bygmalion, Guérini, Morelle et autres Balkany, les affaires ont fait couler plus d’encre que les projets et les rêves.
On peut bien sûr observer ce marigot avec un regard blasé ; penser qu’hypocrisie et malhonnêteté sont consubstantiels à la politique ; que ces hommes, pris la main dans le pot de confiture, sont le symbole de la décomposition d’un système. Mais ce n’est pas aussi simple et réducteur que le slogan « Tous pourris ! ». Dans Le Prince, Machiavel distingue les vertus morales des vertus politiques. Selon lui, en politique, la fin justifie les moyens ; la sagesse politique est hors de toute morale, elle consiste seulement dans la conquête et le maintien au pouvoir. Le Prince doit avant tout rechercher l’efficacité, être à la fois homme et bête. Je préfère pour ma part l’essai critique Anti-Machiavel du futur Frédéric II de Prusse, édité par Voltaire.
J’aime la politique dans ce qu’elle a de noble et d’humain. L’engagement, la foi en quelque chose qui nous dépasse. Vaclav Havel, écrivain tchèque, emblème de la révolution de velours et premier président de son pays libéré des communistes, écrivait que « La vraie politique, c’est simplement le service de son prochain ». Servir et non se servir.
Mais sur quoi fonder la vérité d’une parole ? La confiance en la parole de l’autre repose d’abord sur le sens de l’honneur. On le croit car on le considère comme un homme d’honneur, c’est-à-dire mu par autre chose que le seul calcul de son propre intérêt ou de celui de son clan.
Idéalement, la Res Publica (la chose publique) doit faire abstraction des passions futiles, des envies ou des calculs personnels. C’est ici la grandeur de la politique : savoir se dépasser tout en restant fidèle à son engagement, à ses convictions les plus profondes, à sa parole tout simplement.
Ces affaires, et d’autres plus proches de nous (de moi) doivent être l’occasion, en cette fin d’année, de réfléchir sur le sens des mots confiance, honneur, dignité, parole et actes. Car finalement quel est le sujet, si ce n’est un problème vieux comme le monde, de nature morale ? La morale a pour objet l’usage que chacun fait de sa liberté. Agir en humanité, agir en humaniste, c’est là pour moi l’enjeu. Sinon, le miroir risque bien de renvoyer l’image du pire de soi-même.
A l’approche de Noël et des nécessaires bonnes résolutions de 2015, je n’ai qu’un conseil à donner à tous ceux qui estiment que l’on peut faire de la politique, à Lyon comme au niveau national, sans honneur, sans dignité et sans humanité. Méditez Sénèque : « Toute méchanceté a sa source dans la faiblesse. »
En illustration, sculpture de Nicolas Milhé, « Respublica », 2009
Cher Erick,
Ton post me conforte dans la réflexion
Mon seul et réel souci est la présence permanente de « Machiavel »de toute sorte dans tous les partis
La fin justifiant les moyens , j’ignore le nom de celui ou celle qui un jour pourra avoir grâce à mes yeux.
On en a connu quelques uns , mais jamais vraiment en haut de l’échelle
Ceux qui ont réussi à grimper se font fait descendre en flamme ….on n’aime pas en France la droiture surtout si elle est teintée d’intelligence , de bon sens et du tout d’honnêteté !……
Bon noel à toute ra petite famille
Amitié
Pascale
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Merci pour ce beau texte qui réhabilite certaines des plus hautes valeurs et appelle au discernement.
Il est néanmoins vrai que depuis maintenant de longues années le renoncement des hommes politiques à l’exercice de la puissance a laissé la place à d’autres pouvoirs, économiques et surtout médiatiques.
Le pouvoir véritable ayant quitté l’arène du politique, les vrais leaders, donneurs de sens et désintéressés, s’en sont allés. Laissant ainsi la place aux petites gens à moralité douteuse …
Bon Noël à tous,
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Je partage l’avis de Philippe. Néanmoins, même si aujourd’hui le politique est dans la magistère de la parole, les actions étant censées s’imposer à lui via les bonnes pratiques mondiales ou l’Europe, il n’en est pas moins vrai qu’il dispose encore d’un vrai pouvoir. Cf l’actuel gouvernement (comme le précédent) qui tranchent sans pour autant appliquer les recettes qui gagnent.
Le pouvoir est donc encore bien (un peu) entre les mains de ceux qui nous gouvernent. Mais tant qu’ils en seront réduits à mesurer leurs bureaux pour les uns ou à savoir s’ils seront président pour les autres, la Respublica passera au second rang !
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Et pendant ce temps, qui change le monde ?
http://www.lesechos.fr/idees-debats/editos-analyses/0204019808162-quand-les-grands-groupes-changent-le-monde-1075615.php
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je vais méditer cher ERICK merci pour tes conseils , toujours judicieux…..
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sacré Gérard… Tu n’étais pas visé, loin de là Même si un petit coup de Sénèque derrière les oreilles ne fait pas de mal !
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j aime ton texte ERICK. J aime par dessus tout la phrase « la politique c est servir et non se servir ».
Cette petite phrase résume tout le malaise que le peuple peut avoir comme opinions des « politiques » en général.
Il y en a à droite comme à gauche qui ont la conscience du service bien sur,(certes ils sont rares) mais on sait bien et le spectacle actuel d’un ridicule absolu médiatisé de façon gourmande par les médias (qui ne font que leur boulot au fond), est une démonstration tragique du but du politique: « se servir » avant de servir. Se faire ré-elire d’abord.
Nous sommes par ailleurs une entreprise, l entreprise France. Une entreprise avec 60 millions de clients. Une entreprise a une stratégie, quelle est la stratégie de l entreprise France?Une entreprise innove, ou est le directeur de l innovation de l entreprise France? ou est le directeur commercial de cette entreprise? Qui a une expérience d entreprise?…..Nous sommes dirigés à l ancienne….. Et je dis cela pour la gauche comme pour la droite
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Merci Erik, on se sent mois seul quand on te lit. Certes les pots de confitures sont tentant mais je crois que c’est une minorité qui met le doigt dedans contre une grande majorité qui fait bouillir la marmite.
D’un autre côté, Aristote écrivait que la vertu est le juste milieu entre deux vices.
Alors fait il y goûter pour ne plus y revenir ou simplement le désirer sans y toucher ?
Politique et philo, sujet hier au lycée : dans la vie, faut il éviter de se contredire ? … La suite l’an prochain !
Amitiés
JPDX
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Cher Erick,
Honneur, dignité,humanité, merci Erick …
Merci à Michel Hébert : l’entreprise France ….
Courage, et générosité …
Tous mes vœux
Amitiés
Serge HUSSON
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Cher Erick,
C’est avec plaisir que je découvre tes mots: Honneur et Morale, si peu présents dans le débat public, voir galvaudés ou même méprisés par nos prétendues élites corrompues jusqu’à l’Ame par l’unique désir de paraître et de posséder.
La Politique telle que tu l’imagines, telle qu’elle devrait être, n’est plus, à mon sens, qu’une étrange chimère agitant spasmodiqement le bel esprit de quelques altruistes en voie de disparition.
L’Egoisme, la Vanité, la Concupiscence et l’Arrogance ont pris le pouvoir révélant en cela la médiocrité et la faiblesse et du temps et celles de nos édiles!!!
Et pourtant!!! Il aura fallut la folie meurtrière d’un groupe d’extrémistes pour voir se lever en un magnifique élan le peuple de la France d’en bas pour défendre noblement ce qui fait la France éternelle , digne héritière en cela des « sans culottes » de 1789 qui se battaient déjà contre l’absolutisme et pour la LIBERTÉ.
Et devant la grandeur de notre peuple, ce n’est pas Machiavel et son art de conquérir et de conserver les principautés à l’attention des Princes que j’aimerai citer, mais plutôt Balthasar Gracian y Morales qui dans ses « Traités politiques, esthétiques, éthiques » , est connu pour sa réflexion subtile et profonde sur les arcanes de la vie sociale et pour les conseils de comportement qu’il donne, dont l’Homme Politique ou le professionnel d’aujourd’hui peuvent tirer beaucoup de profits d’une oeuvre majeure qui, à travers les différentes figures que sont « l’honnête homme », « l’homme de cour », le « héros » ou le « bel esprit », s’interroge sur la destinée de l’homme, son rapport à la société, à la langue et à Dieu.
A l’exemple de la Vertu du Peuple doit désormais répondre l’exigence de Probité de toutes ses Élites afin de rétablir l’indispensable confiance et de redonner du sens à nos mots communs qui forgent la devise de notre Vivre-Ensemble: LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ !!!
Sinon, passée l’émotion et l’indignation, tel un soufflé, retomberont sur nous les compromissions et autres petits arrangements coutumiers qui nous conduisent, jusqu’à l’aveuglement, au totalitarisme, à la tyrannie, à l’obscurantisme par le plus abject des fanatismes.
JD
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