L’annonce a sonné comme une évidence. A l’issue d’un plan média digne d’une rock star, Laurent Wauquiez a enfin levé un suspense insoutenable : oui il sera candidat à la présidence des Républicains. Pour succéder à qui déjà ? Personne ne le sait. Mais on s’en fout, ce qui compte c’est que c’est quasi plié : il sera élu. Sur une ligne « A droite toute ». Et si c’était là une chance à saisir ?
Une partie de la droite et du centre, allant du député souverainiste LR Julien Aubert au constructif LR Thierry Solère, sont en ébullition. Tout y passe. C’est à peine s’ils ne recyclent pas les slogans « Le Sida ne passera pas par moi » ou « Au secours, la droite revient ». Bref, le grand jeu des postures TSW -Tout sauf Wauquiez- a démarré. C’est qu’il s’agira de se vendre au meilleur prix. Donc il faut montrer ses muscles, quitte à ce que les biscottos ressemblent plus à des bras d’enfant qu’à ceux de Teddy Rinner !
On empile les menaces de départ, de scission, de création d’un bidule dont personne au juste ne connaît les contours. Mais en ont-ils vraiment envie ? Car à force de vouloir « rassembler sans se renier », Wauquiez les place dans une posture difficile. Celle des diviseurs. Et au jeu du « c’est celui qui dit qu’y est », pas sûr que les contestataires gagnent à terme la bataille de l’image.
Certes, Laurent Wauquiez a, pour une partie des militants et des électeurs, une image dure, intransigeante, sorte de facho lumineux. Mais pour lui, « les valeurs que nous défendons ne sont pas celles de la droite dure, ce sont les valeurs centrales de la France. (…) Une droite qui cesse de s’excuser… » Dont acte. Et même si beaucoup ne lui pardonnent pas son attitude du second tour des présidentielles, refusant de choisir entre Macron et Le Pen, ce qui est tout aussi -intéressant, c’est la façon dont il gère sa majorité régionale qui va de Philippe Meunier (LR tendance Droite forte) aux Modem (tendance La République en Marche). A l’arrivée, ça marche et ça bosse. Pour combien de temps, je ne sais, mais il a su séduire, rassembler et convaincre.
UDF contre RPR ? Ce qui m’amuse le plus, ce sont ces commentateurs (et élus) qui pronostiquent le retour de l’UDF face au RPR (donc à Wauquiez). Ils manquent de mémoire, tant ces deux partis étaient avant tout des rassemblements. L’UDF allait de Claude Malhuret, à l’époque au centre gauche, à Alain Griotteray, éditorialiste au très droitier Figaro Magazine. Et le RPR parcourait lui aussi tout l’échiquier politique des gaullistes sociaux à Charles Pasqua. Bref, l’unité dans la diversité.
Dans ces deux partis, et plus particulièrement à l’UDF que j’ai bien connu au siècle dernier, les débats faisaient rage. C’était parfois violent. Mais nous avions une colonne vertébrale idéologique qui nous permettait de nous rassembler sur l’essentiel (90%). A l’UDF, nous étions libéral, social et européen. A partir de ces trois mots, nous pouvions définir un projet.
Aujourd’hui, faute d’écoles de formation et d’élus avec une vraie colonne vertébrale politique, on s’écharpe souvent sur le futile négligeant l’essentiel. On préfère le médiatique au fond, la forme à la réflexion.
Alors Laurent Wauquiez président, c’est grave docteur ? Je fais le pari que non. Bien au contraire, car face à la déferlante, ses opposants de l’instant, qu’ils soient juppéistes, constructifs, centristes, libéraux ou un peu de tout ça à la fois devront, pour exister, travailler sur le fond des idées et du projet. Il ne suffit pas d’affirmer sa volonté de construire une chapelle. Ce qui compte, c’est pour quoi faire ? Pour quel projet de société ? Pour quelles valeurs (mince j’ai lâché le mot tabou !) ? Et il n e s’agit pas d’agiter un épouvantail pour être crédible.
Quant au risque qu’un discours à droite soit perçu comme un FN light, cela ne me dérange pas. Ce qui me dérange plus, c’est de voir une Marine Le Pen et ses commensaux caracoler en tête des élections. Tout le monde s’en effraie, mais personne ne va plus loin, préférant une fois de plus la posture de la vierge effarouchée à celle du combattant. « Ce dont on a besoin c’est de ramener à nous les 35 % de ces gens qui ne sont pas des extrémistes, qui ne sont pas des fascistes, et que l’on a perdus, glisse Laurent Wauquiez. Et personne ne pense que c’est peut-être le meilleur service à rendre à la République ? »
A force de vouloir imposer Macron comme représentant de tous, on aura, s’il échoue, le choix entre les deux extrêmes. Or je suis issu d’une famille de pensée qui ne se résout pas à disparaître, noyée en marchant*. Ce qui ne veut pas dire pour autant que l’on ne peut pas être constructif si les projets sont bons. Et disruptifs s’ils ne sont pas bons. Comme un « Oui, mais » qui sonne agréablement à mes oreilles encore un peu giscardiennes. Le plus important étant le mais…
Alors, serais-je devenu wauqueriste ? Non. Juste lucide. Il s’est organisé, les autres se cherchent encore une raison de (sur)vivre.
Transformons cette impasse en opportunité. Comme au judo. N’ayons pas peur de la concurrence, surtout lorsqu’elle est forte. Les entreprises qui réussissent sont celles qui sont agiles, créatives et toujours en mouvement. Et qui ont un vrai projet, solide, et répondant aux besoins du marché, quitte à créer le besoin et l’envie s’il le faut. C’est le sens de l’histoire. C’est d’ailleurs ce qu’à fait Macron. Alors chiche, Wauquiez Président ? Je suis sûr que c’est ce qui peut nous arriver de mieux pour reconstruire vraiment un courant de pensée libéral, social et européen ! Encore faudrait-il que nos élites si promptes à critiquer la main sur le cœur en aient réellement l’envie et… le courage !
* Je précise que cela fait bien longtemps que je n’adhère plus à un parti politique
J’avoue que je suis sidérée par le manque de leçons tirées des échecs récents. Il ne s’agit pas de changer la tête mais bien de donner un sens à ce parti et de corriger les problèmes de gouvernance qui les ont conduits là où il en sont.
On ne peut pas se positionner seulement en opposition au Président, encore faut-il être capable de donner espoir, d’insuffler une vision. je n’ai rien entendu de ce type, que des guerres de personnes sans aucun intérêt. Ces rivalités vont encore diviser les rares adhérents restant.
Ce parti est mort financièrement et moralement. Une seule personne se pose -t-elle la question de comment on en est arrivé là, juste pour éviter de rejouer la même scène dans quelques années?
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